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Keshinee: Le 10/06/2025 à 09:43 | MAJ à 10/06/2025 à 09:45
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Dr Nishan-Moheeputh
Publié : Le 10/06/2025 à 09:43 | MAJ à 10/06/2025 à 09:45

Le Dr Nishan Moheeputh, médecin, est poursuivi pour tentative d’attentat à la pudeur. La défense souhaitait obtenir les dossiers médicaux complets, y compris psychiatriques, de la plaignante admise à l’hôpital Victoria, estimant ces documents cruciaux pour interroger la plaignante et établir un éventuel mobile lié à une prétendue instabilité mentale.


Dans une décision rendue le 4 juin 2025, la Cour intermédiaire a rejeté la demande de la défense visant à obtenir les dossiers psychiatriques de la plaignante, invoquant la nécessité de préserver le secret médical et l’absence de préjudice manifeste à ce stade du procès.


La poursuite s’est opposée fermement à cette requête, soulignant le caractère confidentiel des informations sollicitées et l’absence de consentement explicite de la plaignante.
 

Dans son analyse, la magistrate M. Lambert-Henry s’est appuyée sur l’article 300 du Code pénal mauricien, inspiré du droit français, qui sanctionne toute divulgation illégale de secrets professionnels. Elle a rappelé que si la jurisprudence française a longtemps penché pour une approche « absolutiste », la tradition judiciaire mauricienne adopte une vision « relativiste » : le secret médical peut être levé lorsque le patient y consent ou lorsque l’intérêt d’un procès équitable le justifie.


Cependant, comme l’a noté la Cour, cette exception ne s’applique que si les éléments sollicités sont clairement identifiés, nécessaires à la défense et que le patient y a consenti. La requête de la défense, portant sur « tous les dossiers médicaux, psychiatriques et tout autre document pertinent » concernant la plaignante, a été jugée trop large. De plus, aucune preuve tangible d’un préjudice potentiel n’a été rapportée si ces dossiers n’étaient pas communiqués.


La magistrate a précisé que le simple fait que la plaignante ait été référée à un psychiatre après l’examen médical ne suffisait pas à justifier une levée du secret médical, d’autant plus que la défense n’avait pas demandé la comparution du médecin concerné pour un contre-interrogatoire.


S’appuyant sur la jurisprudence anglaise (affaires In the Matter of C (A Child), 2015, et R (on the application of TB), 2006), la Cour a rappelé que les données de santé mentale, du fait de la stigmatisation sociale, nécessitent une protection accrue. Toute divulgation doit être strictement proportionnée et justifiée.
Enfin, la Cour a distingué cette affaire de State v Bacha (1996), où des déclarations de médecins avaient été divulguées dans le cadre d’un procès : ici, il s’agit de dossiers médicaux détenus par une tierce partie, et non de simples témoignages recueillis durant l’enquête.


En conclusion, la magistrate a rejeté la demande de la défense, estimant que le droit à un procès équitable n’était pas compromis à ce stade et que la confidentialité des données médicales prévaut en l’absence de consentement clair ou de besoin impérieux. L’affaire a été renvoyée pour la suite des débats.

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